En matière de taxe professionnelle, la jurisprudence précise
l'exercice de rattachement de la charge, le calcul du coût de production
des stocks et les modalités de détermination de la valeur
ajoutée.
Peut-on provisionner la charge de taxe professionnelle ?
Fiscalité
Si la déduction des seuls impôts mis en recouvrement ou devenus
exigibles au cours de l'exercice est permise par l'article 39-1-4°
du CGI, une provision peut néanmoins être constituée,
en application de l'article 39-1-5° du CGI, pour des charges fiscales
calculées sur les bases et selon le taux prévus par la législation
en vigueur à la clôture de l'exercice, à raison des
faits survenus au cours dudit exercice.
Peut-on, pour autant, provisionner la charge de taxe professionnelle ?
Dans une décision récente, la Cour administrative d'appel
de Bordeaux rappelle que, pour provisionner un impôt, il faut que
le fait générateur de ce dernier soit survenu au cours de
l'exercice clôturé. Pour la taxe professionnelle due au titre
de l'année N, le fait générateur est constitué
par l'exercice de l'activité au 1er janvier N, même si la
base de cette taxe est assise sur des éléments des exercices
clos en N - 2. Une entreprise ne peut donc pas provisionner, au titre
de l'exercice N, la taxe professionnelle dont l'assiette repose sur des
éléments de cet exercice car le fait générateur
de cette taxe n'interviendra qu'en N + 2 (CAA Bordeaux 26 mars 2002, n°
2124).
Comptabilité
Le Plan comptable général définit désormais
une provision pour risques et charges comme un passif dont l'échéance
ou le montant n'est pas fixé de façon précise (PCG
art. 210-3). Un passif résulte d'une obligation de l'entreprise
à l'égard d'un tiers dont il est probable ou certain qu'elle
provoquera une sortie de ressources au bénéfice de ce tiers,
sans contrepartie au moins équivalente attendue de celui-ci (PCG
art. 212-1).
En matière de taxe professionnelle, l'obligation de l'entreprise
au paiement de la charge résulte non de l'utilisation de moyens
de production qui servent d'éléments d'assiette pour son
calcul, mais de la poursuite de l'activité au cours de l'année
d'imposition. En conséquence, il ne nous semble pas possible de
constater, au passif du bilan de l'exercice N, une provision pour la taxe
professionnelle qui sera due en N + 2.
L'application des textes comptables aboutit, en conséquence, à
la même solution que celle retenue du point de vue fiscal.
Taxe professionnelle et coût de production des stocks
Fiscalité
Pour la détermination du coût de revient des stocks de produits
intermédiaires, produits finis, emballages commerciaux fabriqués
et productions en cours, il convient de retenir le coût d'achat
de matières et fournitures consommées, augmenté de
toutes les charges directes et indirectes de production, à l'exclusion
des frais financiers (CGI, ann. lll, art. 38 nonies).
Lors d'un contrôle fiscal, une entreprise qui n'avait pas incorporé
la taxe professionnelle dans la détermination du coût de
revient de ses stocks est redressée. L'administration fiscale soutient,
en effet, que la taxe professionnelle, assise notamment sur la valeur
locative des immobilisations corporelles dont le redevable a disposé
pour les besoins de son activité, constitue une charge indirecte
de production.
Tel n'est pas l'avis de la Cour administrative d'appel de Paris : la taxe
professionnelle constitue un impôt général formant
une charge d'exploitation de l'exercice, mais n'est pas au nombre des
charges directes ou indirectes de production devant être prises
en compte pour calculer le coût de revient des stocks (CAA Paris
14 mai 2002, n° 1237).
Comptabilité
Comme du point de vue fiscal, le coût de production des encours
et des produits est égal au coût d'acquisition des matières
consommées augmenté des charges directes et d'une fraction
des charges indirectes de production (décret du 20 novembre 1983,
art. 7).
Bien que la doctrine comptable ne se soit pas prononcée spécifiquement
sur cette question, il ne nous semble pas que l'on puisse comprendre dans
le coût de production des stocks d'encours et de produits, le montant
de la taxe professionnelle due au titre de l'exercice. En effet, la taxe
professionnelle due au titre de l'exercice et dont le montant pourrait
être compris dans le coût de production des stocks se réfère
à des éléments de production de l'exercice N - 2.
La référence à ces éléments de production
de N - 2 qui déterminent le montant de la taxe professionnelle
ne peut permettre de considérer cette taxe comme une charge directe
ou indirecte de production d'un stock de l'exercice N.
Comment déterminer la valeur ajoutée ?
La cotisation minimale ou le plafonnement de la taxe professionnelle dépendent
de la valeur ajoutée produite par l'entreprise au cours de l'exercice
(CGI art. 1647 E et 1647 B sexies).
Un calcul fondé sur la comptabilité
La valeur ajoutée est égale à l'excédent,
hors taxes, de la production sur les consommations de biens et services
en provenance de tiers, constaté sur la période de référence.
En pratique, cette valeur ajoutée est calculée à
partir des lignes du compte de résultat tel qu'il apparaît
dans les déclarations fiscales 2052 et 2053.
En pratique, elle est égale à la différence entre,
d'une part :
- les ventes de marchandises (ligne FC),
- la production vendue de biens et de services (lignes FF et FI),
- la production stockée (ligne FM),
- la production immobilisée (ligne FN),
- les subventions d'exploitation reçues (ligne FO),
- les autres produits (ligne FQ),
et, d'autre part :
- les achats de marchandises (ligne FS),
- la variation de stock de marchandises (ligne FT),
- les achats de matières premières et autres approvisionnements
(ligne FU),
- la variation de stock des matières présentées ci-dessus
(ligne FV),
- les autres achats et charges externes (ligne FW),
- et les autres charges (ligne GE).
Certains éléments sont toutefois à exclure des lignes
des déclarations 2052 et 2053. Il s'agit notamment des :
- produits et charges se rapportant aux exercices antérieurs,
- loyers des biens pris en crédit-bail,
- loyers afférents aux locations de biens corporels d'une durée
de plus de six mois,
- redevances résultant d'une convention de location-gérance
pour la part correspondant à des biens corporels.
Pour les entreprises dont le chiffre d'affaires hors taxes est supérieur
à 7 600 000 €, une déclaration 2059-E de détermination
de la valeur ajoutée produite au cours de l'exercice est à
fournir avec la déclaration des résultats de l'exercice
Ainsi définie, la valeur ajoutée est une notion spécifique,
différente du solde intermédiaire de gestion « Valeur
ajoutée » du Plan comptable général mais reposant
sur des éléments issus de la comptabilité. Or, pour
la détermination des éléments qui la composent, la
jurisprudence, qui se référait traditionnellement à
des définitions comptables, semble désormais s'orienter
vers des concepts fiscaux.
Vers une lecture fiscale des composantes de la valeur ajoutée
Le point de litige porte souvent sur l'analyse des abandons de créances
qui, en comptabilité, sont enregistrés dans les produits
exceptionnels. Ils n'entrent donc pas dans la détermination de
la valeur ajoutée telle que précédemment définie.
Cependant, la jurisprudence récente tend à considérer
que ces abandons de créances s'analysent, du point de vue fiscal,
comme des subventions d'exploitation à inclure dans la détermination
de la valeur ajoutée servant au calcul du plafonnement ou de la
cotisation minimale de taxe professionnelle (CAA Nantes 4 mai 2001, nos
137 et 637 ; CAA Nancy 5 juillet 2001, n° 2398).
Sur un plan pratique, rappelons que la majorité des entreprises
comptabilisent actuellement leur taxe professionnelle pour le montant
net de dégrèvement, bien que celui-ci ne puisse être
demandé qu'après la clôture des comptes de l'exercice
qui enregistre la charge de taxe professionnelle. La contestation par
l'administration fiscale de la qualification comptable des éléments
entrant dans la détermination de la valeur ajoutée introduit
ainsi une incertitude qui risque de remettre en cause l'automatisme de
cette pratique, notamment lorsque des éléments sensibles
comme des abandons de créances seront comptabilisés dans
l'exercice.
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